Ce dimanche, Patrick nous avait invité Danielle et moi à la communion d'un de ses enfants. Sa famille était presque au complet, ce qui me permit de faire la connaissance de son beau-père juge consulaire, de ses beau-frères et belle-sœurs. Il y avait une palette d'êtres se retrouvant à cette occasion.
Son épouse, Marie, s'affairait à l'accueil et au service de ses invités.
J'eus tout à coup l'impression d'être de trop, le sentiment de n'être pas à ma place. Sentant les prémices d'un adombrement, je me laissai « aller » entre les petits fours et une coupe de
champagne.
Au milieu du brouhaha général, je me rapprochai de Patrick pour lui transmettre cet incroyable instant : « écoute, je suis en 1942, en pleine guerre. Je vois des avions, ce sont des bombardiers
anglais. Je suis convaincu qu'à cette date là, leur objectif était d'atteindre les installations militaires et la piste d'atterrissage de Villacoublay.
Je vois un avion en feu s'abattre là, tout près, dans ce petit bois attenant à votre propriété.
Je suis en train de vivre la désespérance de tout un équipage, je vois une bonne douzaine d'hommes. Il n'y a rien à faire. Ils sont entourés de flammes. L'avion s’abat. Parmi l'équipage,
j'entends nettement la voix d'un de ses membres qui prononce son nom, mais j'ai du mal à le saisir, à percevoir le message de cet homme qui réalisait qu'il n'allait plus être.
Bien entendu, Patrick était bouleversé par mon récit qui était en fait la retransmission d'une scène vécue, d'un événement tragique qui avait eu lieu à quelques centaines de mètres de là.
Je repris cette scène vivante mais j'avais du mal à interpréter ce message. Cet homme qui était là, devant moi, entouré de flammes, criait son nom sans que je puisse le comprendre étant
étranger à ma langue.
J'étais planté là, devant Patrick, puis soudain j'eus un relais, une « Voix » que je connaissais bien vint à mon aide:
"François, non loin d'ici, cet homme repose en paix. Il porte le nom d'une marque de stylo, d'ailleurs tu t'en sers pour écrire. Rends-toi au cimetière et tu trouveras sa tombe ainsi que celles
de ses camarades tombés du ciel."
M’écoutant d'une particulière attention, étant tous deux loin de cette fête familiale, Patrick me reprit dans le cours de l'événement.
"En effet François, il me semble avoir entendu ce fait de guerre.
Nous sommes tout près de Villacoublay, à 1 km environ. Par ailleurs, le jardin jouxte le bois des " Missions Etrangères ", une grande communauté chrétienne. D'autre part, le cimetière que tu
signales se trouve en contrebas à 200 m de chez nous et renferme bien, des tombes d'aviateurs de la guerre 39-45.
Nous pouvons y envoyer mon fils aîné si tu le souhaites, afin de confirmer tes dires ».
Les propos de Patrick m'encourageaient. Une chaleur intense envahit tout mon corps, j'en avais les larmes aux yeux.
Une fois de plus j’allais au devant d'une révélation qui venait de m'être faite et partageai avec Patrick cet instant à la fois si riche et si prenant.
L'enfant venait de revenir en courant, nous annonçant le nom de l'aviateur situé au milieu d'une série de tombe : Reynolds. C'était bien la réponse à la marque de stylo que j'utilisais.
Dans les jours qui suivirent, je reçus un nouveau message destiné à Patrick : "Tu dois te rendre sur la tombe de Reynolds, le soir en revenant de ton travail, face au soleil."
Obéissant à cette injonction, Patrick se rendit vers l'alignement de croix, sépultures de l'équipage qui avait péri ce 29 avril 1942. L’ensemble était parfaitement entretenu et fleuri avec soin. Au
centre, une croix avec l'inscription W.f. Reynolds- âge 25 ans. Puis Patrick se déplaça en direction du soleil. Quelle ne fut pas sa surprise de découvrir tête - bêche une autre
sépulture avec une inscription indoue à l'intérieur de deux cercles concentriques.
Alors tout ému et reconnaissant, sa pensée passa de ses frères d'arme, réminiscence d'un passé lointain, à la découverte d'un être lui rappelant une fraternité spirituelle plus récente, alliant le
mysticisme hindou et chrétien à la fois.
Fort de cette découverte, je me rendis avec Patrick au cimetière. Dès le franchissement du portail d'entrée, je me mis à humer les lieux et le regard vaguement absent je me dirigeai vers
l'alignement des croix. Je défilai au pied de chaque croix en appelant le nom de ces martyrs.
Celle de Reynolds me glaça.
Une pause silencieuse nous unit Patrick et moi devant chacune de ces seize croix sur lesquelles était gravé l’insigne de la Royal Air Force, aigle aux ailes déployées au centre d'une couronne
contenant la devise "PER ARDUA AD ASTRA".
Nous étions très émus, fragilisés par cette réalité qui nous plongeait quarante ans en arrière. Je me mis à prier pour le repos de leurs âmes, convaincu qu'ils attendaient notre visite.
Cette visite à Reynolds, n'était probablement pas inutile.
Elle nous orientait vers une tombe oubliée où reposait un être sublime, un être de paix qui durant sa vie avait été dans le silence de l'Amour et de la Vérité.
Je fus à nouveau aspiré par cette sépulture recouverte des salissures du temps mélange de lichens et de mousse recouvrant lettres et signes.
Tels des archéologues, Patrick et moi, nous nous penchâmes sur cette pierre tombale afin de relever les inscriptions funéraires qui y étaient gravées, mais dont la lecture nous était difficile.
Nous nous mîmes à gratter cette pierre qui me parlait et révélait l'identité d'un personnage.
Sur cette pierre plate et rectangulaire se trouvaient des inscriptions en sanscrit.
Tout émus de notre découverte, nous reprîmes le chemin du retour et je dis à Patrick: "Demain nous reviendrons avec un saut et une brosse pour nettoyer cette tombe ".
C'est ce que nous fîmes le lendemain en fin d'après-midi. Pendant deux heures nous grattâmes la pierre qui prenait vie à nouveau, nous révélant avec plus de lisibilité les inscriptions
relevées.
Tout en procédant au nettoyage de la dalle, je dis à voix haute pour que Patrick puisse relever ce qui était dit: "C’est un maître qui est enterré ici".
Plaçant mes deux mains quelques instants sur les deux caractères alpha et oméga je me chargeai sur un plan vibratoire. Je sentis couler en moi une lave de chaleur intense.
Rompant à nouveau le silence, j'ajoutai: "On me demande de me rendre à une autre tombe où doit se trouver une colombe. »
Me dirigeant vers le fond du cimetière, je découvre cette colombe gravée sur une plaque de marbre sur la tombe d'un dénommé R.TELLIER.
Nouveau rébus, l'aigle, le faucon de l'insigne, la colombe, et ce nom TELLIER.
J'eus instantanément la réponse: " T’es lié ", mais à qui ?
Qui est donc J..MONCHANIN ? Car c'est vers lui que nous sommes de nouveau envoyés. Passant à nouveau devant sa tombe nous prîmes le chemin du retour.
Le lendemain, nous apprenions par la paroisse de Bièvres que la tombe de Monchanin était la sépulture de l'abbé Jules Monchanin qui avait consacré sa vie sacerdotale au rapprochement du christianisme
et de la mystique indoue, vivant en Inde et ayant totalement épousé, pour mieux s'en imprégner, la culture extrême-orientale.
Il avait été inhumé dans ce cimetière de Bièvres, étant décédé subitement le 10 octobre 1957 chez un de ses amis qui d'ailleurs à ce jour, consacre son temps à faire connaître par l’édition la pensée
vivante de l'abbé.
Le jour de l'Ascension, j’entraînai une nouvelle fois Patrick au cimetière pour y déposer quatre roses:
- trois sur la tombe de Reynolds
- une sur la tombe de Jules Monchanin
Est-ce une rencontre insolite ?
Est-ce la rencontre d'un initié parmi d'autres ?
Fait troublant, un rosier poussait à la tête de ces deux tombes : celle de Monchanin et celle de Reynolds.
Le resserrement de mes liens avec Patrick accroissait et enrichissait mes prédispositions sensitives.
Je notais qu'en sa présence, mon acuité réceptive des contacts spirituels évoluait tant au niveau intérieur qu'extérieur.
Ceci se manifestait sur le plan intérieur par des écoutes suivies en présence du Maître.
J'avais le sentiment profond que Patrick devenait pour moi le troisième pôle nécessaire à mes rencontres "suprasensorielles".
Aucun scepticisme ne venait embuer les flashs, les messages que je recevais.
En un mot il me servait d'antenne et devenait petit à petit le " provocateur " de mes moments " branchés ".
Le Maître, dans cette trilogie se manifestait bien plus aisément.
J'étais à la fois le récepteur, l’émetteur et l'acteur.
Ainsi, chaque message que j’émettais, était-il enrichi par une gestuelle correspondant à la scène vécue.
C'est avec une grande facilité que je remettais mes "réceptions" dans leur contexte.
Nous étions ainsi devenus avec le Maître, un trio unique en son genre.
Il aimait à venir me voir chez moi. Là, nous passions en revue tous les événements de la vie courante. Il posait ses questions et avait les réponses, réponses qui ne m'appartenaient pas. Plus
d'une fois nous en eûmes ultérieurement la confirmation.
Progressivement, nous découvrîmes que, bien souvent, la réponse qui nous était faite rejoignait la réalité d'une actualité qui s'étalait là devant nos yeux et nos esprits.
Lorsqu'elle se réalisait, cette voyance était continue et très riche. Elle se répétait à chacune de nos rencontres.
Patrick avait tendance à se référer à des œuvres écrites, littérature spirituelle et mystique. Il était trop intellectuel et avait du mal à libérer son esprit de cette lecture nourricière.
Nous échangions nos pensées au travers de cette lecture et quelle que fût sa nature, nous trouvions toujours un accord dans nos réflexions.
À chaque question posée, nous avions une réponse. Était-elle la référence, la bonne ? L'étincelle jaillissait pour nous éclairer sans effort de notre part.
Oui, j'étais convaincu que nous venions de réaliser une trilogie parfaite, car le Maître était toujours présent.
D'ailleurs, il devait se manifester quelques jours après notre visite à Reynolds et Monchanin au cimetière de Bièvres.
Patrick habitait au bord du bois du séminaire de la congrégation des missions étrangères. Un samedi après-midi, ne travaillant ni l'un ni l'autre, je lui demandai de visiter ce bois ensemble. Il me
donna son accord, lui-même y pratiquant régulièrement son footing.
Ce désir de visite trouva sa réponse une fois sur place.
Avec Patrick en tête, nous entamions notre promenade. Une inexplicable attirance pour ce bois m’interpellait.
C'est vrai...j'avais désiré faire cette promenade et après tout ce n'était qu'une promenade.
Et pourtant ce ne fut pas une ballade ordinaire.
Prenant un sentier, enchantés par le ramage des oiseaux nous nous enfonçâmes dans la profondeur du site.
À un moment, je sentis très nettement que nous étions suivis. Je dis à Patrick d'une voix haletante: "Patrick, nous ne sommes pas seuls. On nous épie. Je sens des regards posés sur nous."
Je ne vous le cache pas, cher lecteur, une certaine frayeur me gagnait. Je repris à nouveau : "Patrick, on nous regarde, cette fois-ci, je peux te dire que nous sommes entourés de moines, de pères
blancs avec leur capuche.
Je ne sais pas au juste qui ils sont, mais ils nous suivent."Je découvrais, avec une certaine crainte, des silhouettes qui se profilaient à couvert dans le feuillage et les branches tombantes des
vieux arbres.
Patrick, à présent, me suivait. J’accélérais le pas, comme poussé par une force inconnue. De ces silhouettes, ces ombres à forme humaine, je ne percevais que des pieds chaussés de sandales
recouvertes de lanières de cuir.
Au bout du chemin que nous venions de prendre, je découvris une petite clairière bien dégagée, sur le côté gauche dans le sens de notre marche.
Une grille basse en fer forgé délimitait l'emplacement d'un petit cimetière où reposaient exactement onze tombes.
Ces tombes étaient disposées de part et d'autre d'une allée centrale, la onzième orientée vers un piédestal d'où s'élevait une grand statut de la Vierge tenant le Christ mort descendu de la croix. La
Piéta était là devant nos yeux.
Je fus très surpris de cette découverte, Patrick ne m'en ayant jamais parlé.
Je demeurais très perplexe au regard de cette découverte au milieu du bois et des tombes.
Me détournant, je découvris six autres tombes où reposaient cette fois non pas des pères blancs mais des religieuses.
Décidément me dis-je, quel mystère entoure ce vieux cimetière du séminaire.
N'étant ni fossoyeur ni agent d'entretien de pierre tombale, je cherchais à comprendre le secret de ce lieu.
Revenant sur nos pas au milieu des onze sépultures, mon regard s'éleva vers la Piéta.
Je vis Marie souffrante tenant son fils dans ses bras. Aussitôt, une fraîcheur m'envahit, que dis je, j'étais glacé et j'entendais très nettement la voix du Maître me dire: "François, réunis les
douze apôtres et reviens sur les lieux afin de purifier ces êtres qui sont abandonnés depuis si longtemps.
Ils gisent là pour un temps. Votre visite est, par ma volonté, voulue afin qu'ils revivent dans l'esprit des hommes. Tu procéderas à la bénédiction du site. Ils te rendront grâce."
Je repensai avec Patrick au message reçu qui nous laissait pantois et dis une prière pour le repos de ces âmes.
Nous reprîmes alors en silence le chemin du retour.
Arrivé à la maison, Patrick révéla à sa femme la singularité de notre rencontre dans ce cimetière où reposaient ces serviteurs de Dieu.
Elle n’y attacha d’abord que peu d’attention.
De retour chez moi à Palaiseau, j'informai ma femme de ma découverte comme je le faisais toujours lorsque je vivais des situations insolites.
Ce n'était pas fini... Qui étaient ces douze apôtres que je devais réunir ? Quelle forme devais-je donner à la bénédiction ? Comment allais-je m'y prendre pour annoncer cela à douze
personnes de mon entourage ?
N'allais-je pas par cette voie au devant de questions auxquelles je n'étais pas en mesure de répondre. Mais la foi... la foi... vint à mon aide.
Le soir venu, je me mis en prière et reçus les indications complémentaires: "En réponse à ta question des douze apôtres: réunissez-vous époux et épouses. Il vous faudra être six couples »...
Tout se déroula simplement.
Je rassemblai pour le samedi suivant, Patrick et son épouse Marie, moi-même et mon épouse Danielle, Tony J. avocat au barreau de Guadeloupe, les époux P. qui habitaient Igny et cinq
autres personnes.
De passage chez Patrick, je remis à chacun une bougie. Je pris deux récipients pleins d’eau et deux brosses. Je tenais à renouveler l'opération "Monchanin ", consistant à nettoyer
les dalles de pierre de chaque sépulture afin de faire apparaître les noms et dates de décès.
Je voulais ainsi les connaître.
Le jour tombait dans un ciel couvert, un vent frais nous balayait le visage alors que nous progressions en file indienne vers notre clairière.
Lorsque Marie découvrit à son tour le cimetière, elle fut prise de compassion et de reconnaissance.
Chacun d'entre nous entreprit de décrasser la tombe de son choix. Cette tâche était malaisée. La patine du temps avait recouvert d'une épaisse couche de lichens ces sépultures parfois très
anciennes. Ainsi apparurent des noms et dates très divers... 1890- 1919 etc.
Dès que nous pûmes lire les noms de ceux qui reposaient, nous nous mîmes à allumer chacun notre cierge.
Événement incroyable, la pluie se mit à tomber tout autour de nous. Le vent soufflait, mais les éléments ne vinrent pas troubler notre cérémonie.
Les paroles de la bénédiction me furent soufflées alors que j'étais totalement dans les nuages, ailleurs, ailleurs...
PERE EN TON TRES SAINT NOM
QUE CE QUI A ETE DIT SOIT REDIT
QUE CE QUI A ETE FAIT SOIT REFAIT
PAR TA TRES SAINTE GRACE.
Tous les assistants montraient une profonde ferveur. J'eus le sentiment intime que nous venions d'accomplir ce qui devrait "ETRE".
Au moment de quitter le pied de chacune des sépultures, j'entendis la voix du Maître m'ordonnant de me présenter face aux douze apôtres, tournant le dos à la Piéta.
Je me tournai debout les bras en croix.
Un grand silence nous étreignit les uns et les autres.
Je fus complètement " adombré". Je sentais mon " habillage". Le Christ était en moi. Je pleurai de joie. Un bonheur inégalé m'envahit.
Au moment de nous disperser Tony J. me dit en aparté: "François... le Christ m’est apparu, il était sur toi, il te remplaçait".
Je ne sais comment exprimer ce douloureux bonheur que je vivais. J'ai su me taire durant près de vingt années.
J'étais, je suis encore le plus heureux des hommes.
J'ai vécu, je vis l’inaliénable amour du Maître, du Christ.
Le servir dans le silence représente pour moi, la croix qu'il a portée avec tant de douleur et de souffrance.
Je mis mon âme et mon esprit en repos. Mais nous étions encore très émus par la visite faite aux onze pères blancs. Ceux qui avaient eu la vision christique entretenaient particulièrement nos
échanges.
Quand à moi, je n'avais et ne pouvais donner ni explication, ni commentaire.
Je vécus alors moi-même des moments de perplexité qui alimentèrent mes doutes et agitèrent mon esprit. Je demeurai littéralement prisonnier, enfermé dans un scepticisme. Je doutai même qu'un
jour je fusse en mesure de détenir la raison de mon engagement. Je me livrai corps et âme à ce doute qui ne me quittait plus. J'avais du mal à m'accepter.
J'étais à la limite de me demander si je n'étais pas le jouet de quelques hallucinations vagabondes qui me plongeaient sans cesse dans la "douleur bonheur ". Tout en voulant me libérer du doute,
elles me ramenaient continuellement dans cette incertitude du vécu.
Ce fut pour moi une des périodes les plus difficiles.
Il me fallait admettre que nous avions tous ensemble participé à l'exécution d'un ordre, d'une volonté qui nous dépassait mais à laquelle nous nous raccrochions afin de pouvoir continuer à vivre
notre quotidien.
Quelques semaines passèrent.
J’émis à Patrick le souhait de revenir sur ces lieux si bouleversants.
Avec lui, nous reprîmes, un soir, la sente qui nous conduisait à ce petit cimetière où reposaient les corps de nos pères blancs et religieuses qui nous firent vivre un si grand bonheur.
Notre foi depuis cette expérience s'était transformée en un souffle.
Nous humions pleinement la singularité de cet événement si inspirateur et pourtant imposé.
La découverte que nous fîmes avec Patrick en arrivant nous stupéfia.
Sur ces lieux où nous venions tous de répondre à la sollicitation divine il ne restait rien ni des tombes ni de la Piéta. Tout était nu, rasé.
Je comprenais alors pourquoi nous avions été missionnés: il fallait rendre un dernier hommage sacré à ces sépultures.
C'était un adieu temporel, une ultime bénédiction avant la levée des corps.
J'étais complètement anéanti.
Cependant, de nouveau, le doute s'insinuait dans ma pensée: et si tout ce que nous avions vécu n'était en réalité qu’une illusion dans laquelle, par je ne sais quel pouvoir, j'avais plongé mes
ami. Autosuggestion, hypnose...
Je partageais avec Patrick une multitude d'éventualités circonstancielles qui auraient pu nous leurrer, tant ce vécu nous dépassait.
Désappointés nous reprîmes le chemin du retour.
Dans la nuit qui suivit, je fus réveillé par la « Voix » du maître: "François, ce qui fut, était."
Le lendemain matin, j'appelai Patrick au téléphone pour lui demander de s'informer auprès de la mairie de Bièvres. Je voulais résoudre cette énigme et sortir de ce dilemme.
Patrick approuva ma démarche et me téléphona dès mon retour du bureau.
Il m'annonça que le ministère de l'intérieur venait d'acquérir en partage avec la commune de Bièvres, le domaine des Missions Etrangères.
Cette modification de propriété imposait le déménagement du cimetière et des statuts de ce bois sacré.
" Oh ! Maître, oh ! Seigneur je me lave de toi"
Tout était donc vrai !
En réalité, tout avait été arrangé par le Maître: la visite dans le bois, la découverte des lieux, le cimetière des pères blancs, cet élan qui me poussait à consacrer les sépultures, le nettoyage des
tombes, l'invocation au nom du Père.
Ces pères, ces entités, par la grâce divine avaient eu droit à la reconnaissance des vivants avant qu'ils ne disparaissent à tout jamais.
Seuls ces faits sont là pour nous rappeler à eux.
Ils vécurent vivant parmi les morts.
À compter de cet instant, je retrouvai mon calme, ma sérénité. Patrick était lui aussi très touché par cette annonce.
Je remercie le Maître. Je remercie le Seigneur de m'avoir offert, une fois de plus, l'un des plus beaux présents: la grâce, la foi.
J'étais heureux.