J'assistais un jour à une conférence qui avait lieu au Musée de l'homme.
Le révérend père Jurion, éminent radiesthésiste, donnait une conférence sur les bienfaits de l'homéopathie.
Il était sur l'estrade, près d'un tableau de feuilles de papier.
Tout à coup, je vis très nettement écrite au feutre noir, une date qui selon la « voix » qui me la communiquait était sa date de transition.
Pourquoi ce message?
Que devais-je faire en cette circonstance : me taire ?... aller trouver le révérend Père Jurion pour lui annoncer cette date mortelle?
À la fin de sa magnifique conférence, je m'approchai de lui et lui demandai la permission de m'entretenir avec lui.
Je lui dis ceci : "Père, alors que vous étiez sur l'estrade en train de..."
Je lui donnai, sur une feuille, la date que l'on m'avait "donnée", mon nom, mon adresse, mon numéro de téléphone.
Un jour ... une femme me téléphona pour m’annoncer la mort du père Jurion.
Il avait informé sa secrétaire qu'à sa mort, elle devait ouvrir l'enveloppe qui reposait sur son bureau et suivre ses instructions.
C'est ainsi que je fus informé de sa transition.
C'est au cours d’une des conférences de ce Révérend Père, que j'eus pour la première fois l'occasion de rencontrer Richard...
Il était assis devant moi, comme dans une salle de spectacle, il me précédait dans la rangée de fauteuils.
Soudain, je me penchai vers cet homme jeune, qui tout étonné de se voir interpeller discrètement tourna sa tête vers moi. Je vis un regard sans regard se poser sur moi.
À ses pieds une canne blanche.
Il était aveugle.
En lui glissant une des cartes de visite que j'avais toujours dans ma poche je lui dis : "Vous savez, vous reverrez un jour, voici mon numéro de téléphone. Appelez-moi quand vous voudrez".
J'eus en retour quelques désagréables propos.
Un an après, on me demandait au téléphone.
J'avais à cette époque, à partir de 18 heures, d'innombrables communications pour des rendez-vous relatifs à des soins, des messages à donner... bref, une véritable charge de voyant et ce, tous les
soirs jusqu'à 21 heures.
Je reconnus cette voix et pensai à Richard.
Il me signalait qu'à la suite de notre " rencontre ", quelques jours après, il eut quelques manifestations oculaires qui lui posaient problème.
Il était doté d'un fluide extraordinaire, comme d'autres aveugles, dans la profession de masseur.
Je lui demandai s'il désirait me rendre visite chez moi à Palaiseau et que dans l'affirmative, je le recevrai avec plaisir et attention.
Je lui précisai qu'il ne fallait rien précipiter et attendre un lendemain... qui ne vint que six mois plus tard.
Cette fois, j'allai le chercher à la gare de Massy-Palaiseau.
Après quelque attente, ayant confondu Palaiseau et Massy-Palaiseau, je vis arriver
un jeune homme très alerte, balayant son chemin de sa canne blanche qu'il venait de déplier.
Je me rapprochai de lui...
Il dut me sentir car il vint droit vers moi, un peu gauche, mais très franchement, sans complexe.
Je lui serrai cordialement la main gauche... et il me serra longuement la mienne.
Je souhaitais l'aider pour l'orienter vers ma voiture mais il me fit remarquer qu'il savait se débrouiller n'ayant pas de chien d'aveugle...
Une fois arrivés chez moi, nous nous mîmes à table.
Mon épouse était très intéressée par cette visite et très sensible à l'infirmité du jeune homme que l'on sentait heureux d'être avec nous.
À un moment, il évoqua les instants de notre toute première rencontre où il avait manifesté sa défiance à mon égard (ce qui était tout à fait normal).
Après dessert et café, je l'invitai à me suivre dans mon bureau d'accueil.
Je lui demandai de s'allonger sur la banquette et là, j'entrepris le « voyage de la visibilité ».
Tout ce que je faisais, était dirigé, voulu, indiqué par la présence du Maître.
J'étais vêtu de blanc, dans un bloc opératoire et je me voyais manipuler une série d'instruments chirurgicaux.
Cela prit un certain temps.
Richard était paisible, allongé, les yeux ouverts laissant apparaître ce vide plein de vue.
Lorsque je terminai mon "opération ", il me dit sereinement : "François, j'ai eu l'impression d'être dans un bloc opératoire.
Penché sur moi, je sentais tous les gestes que tu faisais ainsi que l'imposition de tes mains.
J'ai vécu bizarrement une intervention chirurgicale.
Il était très heureux des heures que nous venions de passer ensemble.
Nous nous sommes quittés à la gare de Palaiseau.
Son passage chez nous avait laissé planer une euphorie bienfaisante.
Il me donnait régulièrement de ses nouvelles.
Un jour, il m'apprit qu'il arrivait à percevoir au bout d'un brouillard, les formes de la vie.
Il s'était mis à lire en promenant son livre, de gauche à droite comme s'il lisait en braille.
Mais je pense que, par déviation, il tenait son livre et le promenait sous "son regard" au lieu de promener sa tête et son regard.
"Je souhaite ardemment avoir de tes nouvelles Richard ».
Tant de temps s'est écoulé.
Mes fraternelles pensées t'accompagnent dans ton combat vers la lumière.
Les progrès actuels de la « science » nous permettent d’espérer, qu'un jour, ils t’apporteront, ainsi qu’à tes compagnons d'infortune ce regard nouveau.