Dans les semaines suivantes, une invraisemblable course à l'événement devait me tenir en haleine et satisfaire mon désir de service.
On me présenta un jour une mère inquiète de l'état de santé de son jeune enfant qui venait d'être hospitalisé à Necker, l'hôpital des enfants malades.
Je me rendis au chevet de l'enfant, accompagné de sa mère, me faisant passer pour son oncle.
Je revins souvent au pied de son lit.
Par ailleurs, il ne fallait d'aucune manière éveiller l'attention de la surveillante du service.
A chaque visite, je m'angoissais davantage car l'état de santé de l'enfant empirait.
Il ne me restait qu'une seule chose à faire : prier…
La tête de l'enfant prenait de jour en jour une forme ovoïdale.
Il souffrait d'une céphalée déformante qui lui donnait l'apparence d'un « petit martien ». Je continuais inlassablement mes visites. Le soir, après mes heures de bureau, j'allais à l'hôpital où je
retrouvais l'enfant en présence de sa mère.
Un soir, je fis la connaissance du père qui ne semblait pas au courant de mes visites.
D'origine très modeste, sa profession de routier ne lui laissait guère l'occasion de voir son fils.
Comme d'habitude, mais cette fois en sa présence, je fis mes prières et mes incantations. Elles le mirent dans une rage folle.
Il n'avait aucune confiance en moi et croyait encore moins aux effets conjugués de nos prières.
Pour lui, je n’étais qu'un charlatan qui contrevenait à l'exercice de la médecine.
En revanche, son épouse partageait avec moi l'espoir d'une guérison. Elle était croyante et mes visites répondaient à un besoin intérieur.
Le comportement de cet homme qui parlait avec moi à haute voix, finit par attirer l'attention des soignantes et du médecin qui se révéla être le professeur L.
Après des explications auprès de cet homme, je fus invité à quitter sur-le-champ le service.
La mère du petit Eddy était profondément désolée de l'attitude de son époux que je comprenais parfaitement et dont je ne lui tenais pas rigueur.
Toute cette scène n'était pas passée inaperçue.
Aux côtés du petit Eddy se trouvait un autre enfant malade, souffrant de la même maladie et ayant les mêmes symptômes: tête ovoïdale en forme de poire, yeux gonflés par le liquide rachidien : une
céphalée plus importante que celle présentée par le petit Eddy.
La mère de cet enfant s'approcha de moi et me manifesta sa sympathie. Elle me demanda si je pouvais m'occuper de son Frédéric.
Le hasard aidant, il me rappela mon propre fils que j'avais perdu, très jeune, d'une toxicose infectieuse et qui portait le même prénom.
Ce nouvel éclairage allait modifier profondément mon comportement, ma façon d'être et d'agir envers les êtres.
D'un côté, j'avais un enfant dont le père avait manifesté son désaccord et ne voulait plus entendre parler de moi, de l'autre, une mère qui me priait de prendre en charge son enfant et de
l'accompagner de mes prières.
J'eus à maintes reprises l'occasion de revoir ces mères.
L'une, inquiète de ne plus me voir rendre visite à son petit Eddy, l'autre, rassurée par ma présence, attendant qu'un miracle ait lieu pour son Frédéric.
Les événements allèrent très vite.
Les deux enfants furent rendus à leur famille respective.
Un nouvel espoir était né: celui de pouvoir plus aisément leur rendre visite chez leur parent.
J'allais donc avec plus de sérénité et de courage tenter de poursuivre ces premiers contacts.
Une grande confiance m'habitait ! Je sentais l’exaltante pression qui se manifestait en moi.
J'étais tous les soirs, toutes les nuits, habité par le rêve de voir ces enfants courir et rire, se tenant par la main.
Cette image me revenait sans cesse. J'étais emporté par une joie immense. Je n'étais pas seul dans l'accomplissement de ma Mission.
Je devais coûte que coûte sauver ces enfants.
La mère de Frédéric acceptait mes visites. Son mari, pilote de ligne, mis au courant, ne manifestait aucune opposition à ma présence. Tout allait pour le mieux. L’état de santé de Frédéric
s'améliorait. Il représentait pour moi la foi que j'avais à l'égard du Maître toujours présent dans mes longs moments de prière.
Je sentais qu'il en était autrement du petit Eddy. Sa céphalée, aux dires de sa mère, avait très nettement diminué. Je n'étais pas en mesure de lui rendre visite car son père refusait de
m'accepter.
Ces deux mères qui habitaient l'une et l'autre à l'opposé de l’avenue du Général de Gaulle à Chatillon, communiquaient par téléphone. Tous les jours, elles partageaient leur angoisse et leur espoir
de guérison.
J'avais pour la mère d’Eddy une grande compassion car elle était seule à supporter l'état de son enfant.
Un jour, révoltée par l'attitude de son époux, elle prit la décision de m'autoriser à voir Eddy.
Le jour même, à l'heure du déjeuner, je leur rendis visite. C'est avec une grande joie que nous nous retrouvâmes.
Sa déformation frontale n'avait pas encore totalement disparu et je posai instantanément la question au Maître sur son état.
La réponse me plongea dans une immense inquiétude.
Les vibrations que le petit m'adressait, étaient négatives.
Je me mis, et ce pour la première fois, à lui parler. Bien entendu l'enfant ne me répondait pas. Le dialogue se manifesta par une conviction profonde. Il me répondait sur un plan nouveau.
Son petit être parlait, son corps se taisait, mais une force puissante et génératrice d'un nouveau langage prenait naissance entre nous.
Son âme me parlait, mon âme lui répondait.
Une fusion de nos deux êtres prenait petit à petit, forme.
J'avais le sentiment que nous étions enfin en mesure de partager nos états d'être.
Il était le" Maître". J'avais face à moi, dans ce berceau le "Maître" qui me parlait, qui me consolait, qui me remerciait qui me louait de son amour pénétrant.
Je prenais conscience à cet instant précis, d'une nouvelle fonction phonétique. Nos âmes convergeaient l'une vers l'autre.
Eddy allait vers François, François allait vers Eddy, puis l'éclair nous unissait pour ne faire plus qu'un, lui moi, moi lui.
Cette nouvelle fonction, cette nouvelle forme de langage se révélait à moi et confortait la relation que j'avais avec "mon Maître". Le Maître s'adressait à moi en utilisant le support animique vocal
qui était à la fois celui d’Eddy et du Maître. Cette fusion d'un être innocent et le Maître représentait la " Voix " que j'avais pris l'habitude d'écouter et de respecter.
C'est ainsi qu'il m'apprit, que bientôt il allait rejoindre le souffle.
Comment pouvais-je rejeter cette vérité ?
Le petit Eddy s'adressait à moi en me disant: "Tu vois, je suis le Maître. Je le suis par lui. Par ton silence, par ton amour, François... tu manifestes à ta manière l'amour à mon égard.
Personne, nul individu, nul être, ne t'a demandé de manifester ton amour pour le petit être que je suis."
J'avais les larmes aux yeux, ce qui inquiéta sa maman qui s'était un instant éloignée du berceau, comme pour nous laisser son fils et moi communier à cette source unique.
Ainsi, je découvrais ce souffle grâce au petit Eddy, grâce au Maître-Eddy Maître.
Cette femme présente au chevet de son fils demeurait dans le silence de l'ignorance de son fils devenu Maître.
J'étais vraiment secoué par cette visite.
Comment cette épouse-là, cette femme, pouvait-elle supporter tout ce poids?
Comment son fils, comment le" Maître" se manifestait-il près de cette mère anxieuse pour la consoler de sa pénible souffrance ?
Que pouvait donc faire François ?
Lui donner de l’espoir ? Oui, après tout, pourquoi pas ?
C’est à son échelle, à cette compréhension de la mère, à cet être qui se prénomme Ginette qu’il faut, à tout prix, apporter la consolation, la tranquillité d’esprit, afin que la transmission du «
Maître » dans le fils Eddy, s’opère et puisse s’opérer dans l’immense bonheur de cette fusion heureuse et fatale à la fois.
« Eddy, mon petit Eddy, papa est sur la route au volant de son camion. Peut-être pense-t-il à toi ? Maman est à tes côtés, ignorante de ta grande ascension, baignée par l’amour de la reconnaissance
divine qui vient de s'opérer.
Mère, ton fils est adombré …il n’est plus pour toi. Déjà, il se prépare à partir, à revivre l’instant où il a quitté le Maître.
Quelle belle retrouvaille, prendre et reprendre sa place. Retrouver le souffle qui fut, un instant de la vie, Eddy, pour être, pour devenir, pour redevenir Maître.
Eddy… fils de tous les pères, tu as ouvert mon cœur, mon esprit et mon âme. Je te suis foncièrement reconnaissant de m’avoir injecté ton amour. Tu as, à un moment, présenté mon image à celui qui est
mon « Maître ». Merci. «Maître Eddy » … Que réserves- tu à ta mère…?
Dois-tu lui annoncer ton départ pour ailleurs ? Comment t’y prendras-tu pour lui dire que tu l’aimes ? Quelle porte veux-tu enfin ouvrir pour lui dire, me voilà maman, je t’aime ? »
Trois jours après, le petit Eddy partit pour rejoindre le Maître, pour se rejoindre, pour retrouver ce que l’un devenu l’autre soit à nouveau l’autre pour un Eddy. »
Il me donna alors, la preuve de l’âme et de son unicité.
Penchés, sa mère et moi sur ce berceau, nous vîmes tous les deux la plus belle et la plus réconfortante image de cet enfant qui nous quittait. Son corps était entièrement illuminé par une multitude
de petites étoiles brillantes et baigné d'un halo de lumière.
« Maître, je te remercie de m’avoir donné une si belle image de toi.
Tu étais dans ta magnificence, la lumière même.»
Ginette poussa un cri d’étonnement, de voir ce fils qu’elle avait tant choyé, aimé, soigné, s’allumer comme une bougie le jour d’un anniversaire.
Je demeure, par la pensée, attaché à cette maman et au petit « Eddy ».
Vingt-cinq années plus tard, je reste profondément marqué par la vision qui nous fut offerte par le Maître.
Quelques semaines après, j’eus des nouvelles du petit Frédéric.
Il s’en était bien sorti.
« Frédéric Maître » a-t-il pris un autre chemin que « Maître Eddy » ?
J’eus plus tard la réponse à cette question… C'est la mort de ma propre mère qui me conforta dans ma totale soumission à l’esprit du «Maître », à l’âme de mon « Maître ».
La profonde et bienheureuse cicatrice que me laissa dans son passage ici-bas le petit Eddy allait transformer ma vision de la vie animique.
L'âme est la partie de cette constituante qu'est l'être humain, l'être animal.
Une nouvelle preuve m'en fut donnée autrement.
Nous avions à la maison une bête adorable.
Un « coquer » qui faisait le bonheur de tous et qui vécut douze années.
Je l'avais baptisé Windsor, c'était l'année des "w". Je l'avais élevé comme je l'avais été moi-même...avec sévérité et bonté à la fois.
Il me rendait heureux lorsqu'il s'appliquait à respecter les ordres que je lui adressais.
Malgré cette fermeté, il m'était très attaché, autant qu'à mon épouse qui lui préparait sa nourriture, le soir, au retour du bureau.
Il affectionnait également, ma fille "Valérie" qu'il aimait retrouver pendant ses congés.
Il avait pris l'habitude de m'accompagner le soir dans mon bureau lorsque j'y allais pour méditer ou pour travailler.
Ce soir-là, alors que j'étais occupé à rédiger un texte, j'assistai à un événement surprenant.
Windsor était couché face à moi. Il semblait dormir.
À un moment il se mit à aboyer.
Sans y prêter attention, je continuai à écrire.
Un silence réparateur régnait dans la pièce où j'avais d'ailleurs toujours l'impression de ne pas être seul, sans savoir si cette compagnie était bonne ou mauvaise.
Toujours est-il que, lorsque je sentais des vibrations lourdes et pesantes, j'allumais de l'encens.
Ce procédé me semblait très bénéfique et mon comportement s'en ressentait.
Windsor se mit de nouveau à aboyer.
Cette fois, je levai la tête et fus fortement impressionné par ce que j'observai.
Windsor aboyait après Windsor.
Je le voyais bien. Je n'étais pas sous l'effet d'une drogue quelconque.
Je constatais qu'il s'était naturellement dédoublé.
Assis sur son séant, son corps matérialisé regardait son double dans la même posture. J'en étais stupéfait.
L'aura animique de cette brave bête flottait devant elle.
Le spectacle était insolite.
Je ne devais pas en rester là. Je posai la question suivante au "Maître": quelle serait la vie de cette bête après sa mort?
Manifestement, je prenais conscience que mon chien avait une âme qui se manifestait de la même manière que pour l'être humain.
A sa "transition", son corps resterait pour accomplir sous le regard de l'homme sa putréfaction, alors que son esprit et son âme s'élèveraient pour rejoindre la poche animique animale,
tout comme pour l'homme quand il rejoint le Maître créateur.
Cette créature appartient au Maître créateur qui retrouve ainsi son œuvre.
Dans le cheminement d'élévation, la bête, à sa mort, rejoint le plan inconscient astral pour se loger dans la poche "animale humanimique".
À cet instant même, le maître créateur récupère sa création retrouvée.
Cette partie de la vie animale est identique à celle de l'homme, lors de son retour fusionnel avec le maître.
Il n'y a aucune différence entre la vie corporelle d'un homme et celle d'une bête. Toutes deux à l'initiative du Maître créateur, sont aspirées par l'initiateur de cette grande aventure qu'est la Vie
terrestre.
Dans sa créativité "Notre Maître Créateur" ne classifie pas sa nature : qu’elle soit humaine ou appartenant à la " race des bêtes", il n'opère aucune différence au souffle de vie émis par lui au
moment de sa créativité.
Le processus de vie, de mort, de retour fusionnel, est identique pour toutes les créations qui se manifestent selon la volonté du Maître Créateur.
Appelons cela la créativité "animal humanimique".
C'est une entité tout comme la nôtre qui se mesurera au tri de la vie offerte lors de l'attribution du souffle Maître.
J'étais touché et ému à la fois de prendre conscience que mon compagnon présentait les mêmes attributs que moi-même.
Il avait un corps, une âme et un esprit.
C'est avec le corps qui se muait en ma présence que je relevais son existence.
C'est avec ses réactions que je décelais son esprit,
C'est avec son âme que je réalisais son retour fusionnel au Maître Créateur.
Je remerciai le Maître de m'avoir éclairé sur cet enchantement, de m'avoir aidé à comprendre quel profond respect doit avoir l'homme envers l'animal. Cet animal qui n'est autre que moi, que
lui.
Je découvrais que cet animal faisait partie du cercle familial, comme un enfant nouveau-né rejoint sa famille d'accueil.
Je prenais conscience de cette existence qui dépendait, durant toute sa vie animale, de moi... de moi, qu'on osera appeler son Maître.
J'accepte volontiers avec amour que l'on me dise : la bête ici présente n'est autre que l'enfant du Maître Créateur. Tu auras donc la charge de son éducation parmi nous, parmi vous.
Je finis par ressentir le besoin d'aller me reposer.
Lui, la bête, mon enfant, retrouvait sa couche.
Moi, son tuteur, mon lit.